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décalages et metamorphoses

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Archives de Tag: 1968

« À Carnaval on peut faire n’importe quelle blague ! » ( dessins et caricatures n.32 )

03 mardi Mar 2015

Posted by claudiapatuzzi in dessins et caricatures

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1968, carnaval, Che Guevara, dessins 1966, Gian Battista Vico, Paris, Rome

001_testaindiano180  . 1965Tête d’un indien, février 1966 (cliquer pour agrandir l’image)

Juste hier, le denier jour de février, j’ai trouvé par hasard, effeuillant mon vieux journal de 1966, d’étranges dessins représentant des masques amérindiens ou aztèques, un drôle de personnage coiffé d’une espèce de fez, des pierres précieuses et des ailes de papillon coupées. Sur le fond paraissaient ces inscriptions : « le carnaval des âmes anciennes ! »
« Carnaval aux mille couleurs ! »
« Carnaval des morts ! »

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Un Africain avec le fez et une pierre précieuse : « Le carnaval des âmes anciennes ! Le carnaval de mille couleurs ! » (cliquer pour agrandir)

« C’est bizarre ! » Je me suis dit « …dès lors, beaucoup d’années se sont écoulées. Maintenant, je me retrouve justement dans le mois de février, en 2015. Le mois du carnaval, des masques… c’est exactement ce que dit la dernière phrase : « le mois des morts. » Mais voilà qu’une espèce de chape descend sur mes pensées. À présent, ces rebelles années 1960, ces luttes juvéniles semblent extrêmement lointaines. Leur retentissement optimiste, leur rébellion spontanée contre les préjugés et la mentalité guindée qu’on appelait « bourgeoise » semblent s’être évaporés, engloutis dans l’entonnoir obscur du passé ou dans les flux et reflux des « retours éternels de l’histoire », comme le disait le philosophe Gian Battista Vico.
Combien de reflux de racisme a connu l’histoire ? Combien de crises économiques et de révolutions et contrerévolutions ? Combien de massacres ?

003_farfalla1 -180 copie« Aile de papillon » avec pierre précieuse : « Carnaval aux mille couleurs ! »
(cliquer pour agrandir l’image)

Quand j’ai dessiné ces gueules vernies et parées de plumes, j’allais déjà mettre en crise ma foi religieuse. On était encore deux années avant 1968, mais la « révolution juvénile » voltigeait déjà dans l’air, au-dessus des estomacs nourris par le bien-être économique, tandis que ma chambre sentait les cigarettes comme un cinéma de quatrième catégorie et qu’un très bel homme — Che Guevara — haï par mon père, souriait irrévérencieux depuis une porte de mon placard. Les tiroirs débordaient de jeans et de foulards de coton indien, tandis qu’une quantité de livres proliféraient à grande vitesse sur de longues étagères : Gide, Bernanos, Sartre, Kafka, Dostoïevski, Shakespeare, Poe, Tolstoj, Gogol, Melville, Hemingway, Leopardi, Calvino… Un panneau, avec l’affiche de la femme nue de Corot, trônait au-dessus de la table. Partout des bandes dessinées… et beaucoup de journaux intimes. Pas d’internet ! Pas d’iPhone. Rien de rien. À L’époque, il y avait juste des téléphones noirs et d’énormes ordinateurs tels des dinosaures obèses renfermés à l’intérieur de monstrueux palais inconnus aux chambres invisibles…

004_indianoN.2-180 1965

«Tête d’un Indien aztèque » février 1966 (cliquer pour agrandir l’image)

Et pourtant, combien de légèreté y avait-il dans l’air ! Combien de fantaisies et secrets ! Voilà que quelques chagrins s’engouffrent dans mon esprit… maintenant, je ne vis plus à Rome, mais à Paris. Les derniers événements tragiques de cette nouvelle année m’ont encore plus liée à cette ville d’adoption, forte et courageuse. Cela me projette de plus en plus dans le présent… Comme si le cercle interrompu du passé reprenait son chemin difficile, avant de se refermer dans un « tout »… « Hic et nunc », « ici et maintenant » : ce n’est que comme ça que je veux vivre, ce n’est que cela que je désire : me transformer. Le passé a déjà gonflé pour suinter ses rêves, ses projets, de nouvelles œuvres… c’est comme si j’avais grimpé au sommet de l’Everest en quête d’un horizon possible entre les nuages et que je voyais, de là-haut, l’« autre côté ».

005_alafinale180-1965 - copie « Petite aile brisée » : « carnaval des morts ». (cliquer pour agrandir)

Peut-être, ces étranges ailes coupées et déchirées m’aideront à voltiger comme un papillon au milieu de cette bouillonnante réalité…

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La page complète, dessin en stylo-feutre, stylo à bille et crayons de couleurs, 1966
(cliquer pour agrandir)

Claudia Patuzzi

Texte et photos de Claudia Patuzzi

Alberto Giacometti (dessins et caricatures n.4)

04 vendredi Avr 2014

Posted by claudiapatuzzi in dessins et caricatures

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14° arrondissement, 1968, Alberto Giacometti, Borgonovo, dessins n.4, francis bacon, Jacques Dupin, Paris, rue Hippolyte-Maindron n.46, Sartre, Stampa, Thierry Dufrêne, Val Bregaglia

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Claudia Patuzzi : Albero Giacometti, crayon, Rome, 1968. (cliquer pour agrandir l’image)

Ce dessin d’Alberto Giacometti est accroché sur la paroi juste au-dessus de mon bureau, à côté du portrait d’Utrillo : un couple inséparable ! Il suffit que je lève les yeux pour les voir devant moi, avec leurs regards impénétrables et profonds. Deux dieux tutélaires ? Giacometti était mort en janvier 1966. Deux ans depuis, en 1968, j’eus l’impulsion de dessiner son visage, symbole d’une époque (les titres sur les journaux en reflètent les évènements cruciaux : la mort de Luther King ; le Vietnam ; le phénomène hippy ; l’amour libre ; les mots comme « dévaluation », « paix », « vérité », « guerre »… ) Mais Giacometti va largement au-delà de son temps dans sa lutte incessante pour « redécouvrir » la figure humaine, son essence cachée, creusée dans les coins les plus éloignés de la matière: l’éclat de la vie…

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( cliquer sur la photo pour l’agrandir )

En octobre 1965, quelques mois avant sa mort, sur le bateau qui le ramène de New York en Europe, Giacometti écrit en « Notes sur les copies » : « Je ne sens que la mer qui m’entoure, mais il y a aussi le dôme, la voûte immense d’une tête humaine » (note 1 : Thierry Dufrêne, Giacometti – Les dimensions de la réalité, Skira, Genève, 1994, p.184)

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 L’atelier 46 rue Hippolyte-Maindron, 14° arrondissement de Paris (cliquer pour agrandir)

« Le regard dominateur de Giacometti…  regarde ma tête dans l’espace réel  et, presque à la même seconde,  une autre tête, la même et une autre, en train de se construire sur la toile. Le même geste d’Alberto les fait grandir ensemble, grandir et se dévorer, en augmentant la distance qui le sépare de lui… un gouffre… » (note 2 : Jacques Dupin, Alberto Giacometti, Éclats d’un portrait, éditions André Dimanche, septembre 2007, p. 39)

À Paris, en 1941, Giacometti rencontre Sartre, professeur au lycée Pasteur et déjà écrivain de La nausée. De ce moment le philosophe suivra l’œuvre de l’artiste jusqu’à sa mort. Pour Sartre, Alberto « dégraisse l’espace », conférant aux visages – des « fétiches naturels »- la transcendance visible, à mi-chemin entre l’être et le néant » (note 3 : Thierry Dufrêne, ibidem, p.152) 003_Giac volto600

« Ce qui m’intéresse le plus dans une tête… ce sont les yeux. Quand on regard un homme, on regarde toujours les yeux. Même quand on regarde un aveugle, on regarde la place des yeux, comme si on sentait les yeux derrière… Ce sont les yeux, le regard qui comptent le plus dans un visage. Toutes les autres formes  sont plus ou moins floues et indécises. » (nota 4 : Jacques Dupin, ibidem, p.67.)

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« Il cherche d’attraper dans le vide le fil blanc invisible du merveilleux » (nota 5: Ibidem, p. 77)

« Sa tête acquiert ainsi sa mutité résonnante si paradoxale qui s’oppose au cri bouche ouverte des têtes de Francis Bacon » (nota 5 : Thierry Dufrêne, ibidem, p.166)

006_Giac-600 scjpg « Le peintre est en avant, occupé à une révélation scabreuse infinie par une pénétration acharnée de l’inconnu qui barre le chemin » (nota 6: Jacques Dupin, Ibidem, p. 74) 007_Stampastudio180

Alberto Giacometti dans sa maison à Stampa, dans le Val Bregaglia, le village de la Suisse italienne où il avait passé son enfance. Il a été enterré dans le cimetière de San Giorgio près de Borgonovo. Le corbillard était tiré par le seul cheval du village. Les habitants du Val Bregaglia étaient venus en foule, rejoints par un grand nombre de visiteurs, des officiels et des amis…

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 Alberto Giacometti sur la terrasse de sa maison à Borgonovo.

Claudia Patuzzi

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