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décalages et metamorphoses

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Archives Mensuelles: mai 2015

« Voyage à Rome n.4 » (histoires drôles n.38)

19 mardi Mai 2015

Posted by claudiapatuzzi in histoires drôles

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place Saint Pierre, Rome, voyage

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Les boutiques très chères, les mannequins dernier cri, les vendeurs de glaces, la pacotille religieuse de Borgo Pio ont désormais disparu… Je me dirige automatiquement vers les hauts remparts, un monde que je ne vois plus depuis cinq ou six années. Une frontière entre deux sphères : celle de la réalité et l’autre, l’univers idéal. Le quartier populaire et celui que Dieu et l’Art ont créé. Nous sommes désormais en vue des grandes murailles, quand le pape en personne, en forme splendide, vient envers nous… Je reste ébahie devant cette exubérance… celui-ci serait capable de traîner dans le Paradis même une mouche… « Bon voyage dans notre grande maison ! » il s’écrie, en agitant la main.

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… encore bouleversés par cette rencontre inattendue — « un Pape volant ressemblant à Superman ! » —, nous nous dirigeons vers Saint-Pierre en passant sous un grand arc comblé de « pèlerins »…

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Tout d’un coup, je me trouve à l’intérieur d’un espace où je ne reconnais qu’une « pensée ». Une pensée parfaite et lumineuse, dont l’essence est la pierre, où une myriade de vues et de perspectives vertigineuses ouvrent des visuelles obliques sur des architectures disparates se superposant dans un immense bois blanc et rose…

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Les colonnes, puissantes, mais élancées, nous guident vers quelque chose de grand : un parcours allégorique, de pilier en pilier, évoquant les escalades aux pyramides ou l’entrée cachée d’une chambre secrète… Voilà un palais qu’on dirait bâti dans le ciel…

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Rome est donc devenue cet étrange (douloureux) pèlerinage après de longues années absentes ? Après Turin — ma ville-pont préférée entre France et Italie —, après Paris, cette ville vive et grise à la fois, Rome se matérialise dans ce bois de colonnes et de longues ombres glissant comme du velours sur la surface de cette pierre lisse et dure… Ces jambes blanches de « travertin » m’accompagneront, fidèles, au retour… Au milieu de ces architectures majestueuses, mon passé minuscule se reflète à peine sur cette couche blanche et rose de la pierre de Saint-Pierre qui me rappelle, avec une sorte d’arrogance, le « poids » de l’Histoire…

D’ailleurs, c’est un fait : chaque voyage, ou pour mieux dire « chaque retour » bouleverse nos certitudes, nos « tableaux d’idylles », nos souvenirs, nos projets… Rien ne demeure à sa place. Le Prisme reflète des éclairs multicolores tandis que les rides s’amusent à poursuivre nos émotions d’avant avec celles d’aujourd’hui. Ô voyage ! Il nous donne la possibilité de re-voir, re-penser, ré-construire notre petite maison rouillée par la pluie…

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Mais, qu’est-ce qu’il arrive ? Une voix de femme dans les haut-parleurs bondit de la rue. Je m’accoude au parapet : un cortège douloureux. Des bannières rouge-vert que je ne sais pas identifier, un camion. Je ne peux pas me passer de quelques photos… Quand se terminera-t-il ce chapelet de souffrances subies et remémorées ? À Paris, les rues sont devenues des tapis roulants où coule la voix du monde, des films d’ailleurs affreusement réels, animés de personnes vivantes… Ô Histoire, qu’attends-tu pour donner une voix et de la force à tes souffrances ? Pour rendre la faculté d’entendre aux sourds qui s’y refusent ? Pour donner la vue aux aveugles qui se sont accoutumés à ne rien voir ?

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J’essaie de retrouver le fil coupé de mon itinéraire fataliste. Une porte s’ouvre. J’entrevois la place Saint-Pierre, l’obélisque, la cohue des gens… mais où s’est caché l’autre troupeau, celui qui marchait sur le boulevard ?

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Finalement, le ciel. Que dis-je ? Ce n’est pas un ciel quelconque, mais « le » ciel de Rome, celui que j’ai laissé il y a six ans : tellement bleu, limpide, presque irisé. Ce ciel qui te donne la force de vivre. Avec cette couleur unique que je n’oublierai jamais, jusqu’à ma mort… de l’autre côté de la colonnade se détachent les ombrelles des pins du Gianicolo, là où commencent les prés de la grandiose Villa Doria Pamphylie…

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À travers la place encombrée de chaises pour les pèlerins, en attendant, le dimanche, le discours du pape…

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Dès que j’arrive de l’autre côté du cercle de colonnes et statues, je me retourne en arrière une dernière fois. L’ombre et la lumière fusionnent, le soleil entame doucement sa descente… La fable va se terminer sur un immense plateau de théâtre, une véritable métaphore du monde… Le cercle, le rectangle, les statues, le centre, la fontaine, les bras qui s’étendent pour serrer le vide dans une étreinte douloureuse…

Claudia Patuzzi

« Ascension au Centre Pompadour » (dessins et caricatures n. 33)

14 jeudi Mai 2015

Posted by claudiapatuzzi in dessins et caricatures

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caricatures, Centre Pompadour, Centre Pompidau, Claudia Patuzzi 2015, dessin

001_ascension-180« Ascension au Centre Pompadour » (15 maggio 2015) : feutre rouge, staedtler pigment noir.  (cliquer pour agrandir l’image)

002_le lit en alcove de la marquise, (chateau de Versailles)dans sa chambre - Version 2

Le lit en alcove de la marquise Pompadour ( Châteu de Versailles )

Claudia Patuzzi

« Les livres anciens au Grand Palais-3 » (histoires drôles n. 37)

12 mardi Mai 2015

Posted by claudiapatuzzi in histoires drôles

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Blaise Cendrars, expo livres anciens, Grand Palais, Métro Opéra, Paris, Transsibérien

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À l’improviste, la lumière s’obscurcit. La grande coupole au-dessus de moi est devenue un enchevêtrement de cercles luisants couleur gris de fer. « Il n’y a plus de temps ! Cela va faire tard, je pense tout en regardant autour de moi : il y a encore tellement de surprises, de livres à découvrir… »

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Le concert des joueurs de la clarinette s’est terminé. Doucement, les visiteurs s’empressent vers la sortie, serrant contre leurs poitrines des tuyaux de cartons, des livres, des tableaux soigneusement enveloppés dans des voiles de papier blanc.

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Avant de me joindre à la petite cohue, je me rends chez Blaise Cendrars, trônant au milieu de ses « Poésies complètes », Éditions Denöel, avec sa propre dédicace. Dans ses mots — « Vive la poésie ! » — qu’il avait écrits au stylo, je reconnais son autographe. Le rythme ondoyant et puissant de son « Transsibérien », que nous avons répété plusieurs fois, par cœur, au cercle du Marais, résonne encore dans mon esprit…

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Que vois-je ? Un homme plié en deux est en train d’observer très attentivement d’anciens documents…

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… Mais je vois bien de quoi il s’agit ! C’est un précieux parchemin écrit en arabe ayant au milieu une scène colorée : sur une montagne enneigée, il y a un homme au turban entouré d’autres gentilshommes… Qu’est-ce que cela signifie ? Je pense intérieurement, tandis que le vendeur…

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… il se promène de long en large, à petits pas, nerveusement : est-ce qu’il vendra ce petit chef-d’œuvre, malgré son prix ?

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… C’est un livre recouvert de la soie fuchsia, brodée de magnifiques fleurs. Mais, qu’est-ce qu’il s’y cache là-dedans ? Un manuel sur les plantes et les jardins ? Des histoires d’amour ? Le paradis terrestre ? On ne le saura jamais…

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Pour ne pas assister à sa défaite ou alors à sa victoire tout à fait improbable, je m’en vais regarder une étrange estampe au-dessous d’un verre… Un très joli théâtre en carton… jusqu’au moment où une tache colorée attire mon attention…

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L’air a changé, se colorant d’une couche d’argent sombre. Des lueurs célestes se faufilent dans l’immense toile d’araignée métallique qui pourrait aussi bien servir de volière… Sans vraiment m’en apercevoir, je me dirige vers la sortie où m’attend une sorte de rêve : le Petit Palais offre des lumières dorées à la fête langoureuse du crépuscule. Je reste immobile pendant des minutes, le regard fixé devant moi : Paris ne cesse pas de me surprendre !

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Mais quand je descends dans le métro « Opéra » je sens mon sang se geler : le plafond de la galerie est empesté par des taches grises, gonflées par l’humidité ! Ce sont des fuites d’eau… que de remèdes provisoires essayent vraiment de cacher ou de renforcer !

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Les parois au long du quai souffrent elles aussi de la même gangrène… Pourquoi les rêves doivent-ils toujours finir ?

Claudia Patuzzi

 

 

Les livres anciens au Grand Palais-2 (histoires drôles n. 36)

05 mardi Mai 2015

Posted by claudiapatuzzi in histoires drôles

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Albertine disparue, Annie Le Brun, Antoine de Saint-Exupéry, Celine, Grand Palais, Léon Tolstoj, Les chateaux de la subversion, livres anciens, Marcel Proust, marquis de Sade, mort à crédit, portraits, résurrection

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Voilà, me voici de nouveau, toute seule dans le Grand Palais ! Après avoir salué mon amie libraire, je me promène curieuse et indécise au milieu des autres stands comblés de livres, gravures, dessins, petites statues ainsi que d’étranges objets. Un labyrinthe géométrique… quelle direction vais-je prendre ?

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Portrait de Marcel Proust. Crayon gras de couleur et gouache, signé en bas à droite et encadré. (cliquer pour agrandir l’image)

Un aimant invisible m’attire vers une colonne… où pointent les portraits d’écrivains célèbres, réalisés à marqueur de couleur ou gouache…
Je m’approche avec précaution au visage violet foncé : « Bonjour, monsieur Proust ! » Il me regarde un instant, ébahi, avant de commencer à parler à voix basse, comme s’il s’adressait à lui-même : « Tâchez de garder toujours un morceau de ciel au-dessus de votre vie (…), car la force qui fait le plus de fois le tour de la terre, en une seconde, ce n’est pas l’électricité, c’est la douleur. » (1) Juste après ces mots il devient à nouveau silencieux et mélancolique…

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Portrait de Léon Tolstoj, l’incontournable auteur de « Guerre et paix » et « Résurrection ». Gouache de couleur, signée en bas à gauche. (cliquer pour agrandir l’image)

Mais les deux portraits, signés « Nabe« , sont assez différents l’un de l’autre ! Le portrait de Tolstoj est l’opposé de celui de Proust : dans le visage de l’écrivain français, les yeux sont deux puits rêveurs pleins de nostalgie enfantine ; les yeux de Tolstoj, vivement marqués de noir, paraissent, au contraire, renfrognés et pensifs, gonflés de responsabilités et, en même temps, imprégnés d’une force retenue… Aux moustaches bien soignées, à la bouche rouge et voluptueuse de Marcel, s’oppose la longue barbe fourchue du créateur de Pierre Bézukov et du prince Andrëj, partagée dans un dilemme insoluble : « pourquoi y a-t-il autant d’injustice dans ce monde ? »  Des reflets métalliques dessinent une auréole marron sur sa tête chauve, tandis que le visage d’enfant de Proust s’effondre mollement contre un rideau céleste aux nuances blanches : celui des rêves ? De ses souvenirs perdus et retrouvés ? Des odeurs soudainement ressuscitées ?

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Le marquis de Sade: portrait de l’écrivain rédigeant avec sa plume son célèbre texte « 120 journées de Sodome » sur un roulant de papier. Marqueur de couleur, signé en bas à gauche, encadré. (cliquer pour agrandir l’image)

« Quelque chose commence et finit dans le château de Sade. Ce qui finit, c’est l’assujettissement de l’objet à l’idée, mais en même temps l’asservissement de l’imaginaire à l’ordre du monde. Ce qui commence, c’est une suspicion infinie des apparences et à travers le plus dangereux jeu de miroirs la rencontre de la couleur noire. » (3)

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Antoine de Saint-Exupéry: portrait de l’écrivain à la cigarette. Marqueur de couleur, signé en bas à droit, encadré. (cliquer pour agrandir l’image)

Qui n’a jamais lu « Le Petit Prince » ? Moi, par exemple ! Je l’ai découvert tard, à Paris, tout de suite après mon déménagement de Rome… et cela a été foudroyant, comme un miracle. Je l’ai lu en italien et en français et j’ai vu la vie et le monde se coaguler dans un seul mot. J’ai compris la valeur de la simplicité. La chaleur du don sincère. L’ardeur de la solidarité. La présence puissante et discrète de cet homme volant, sincère et courageux, disparu un jour dans les abîmes de la mer. Une mort mystérieuse qui rend encore plus grand son message poétique et humain. Un conseiller précieux ainsi qu’un poète visionnaire de nos temps… comme le « Petit Prince » ou le sourire des enfants.
Je me souviens de ces mots : « Nous ne demandons pas à être éternels, mais à ne pas voir les actes et les choses tout à coup perdre leur sens. Le vide qui nous entoure se montre alors… » (4) Vol de nuit, éditions Gallimard, p.163

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Voilà enfin de l’écrivain Louis-Ferdinand Céline (nom de plume de Louis-Ferdinand Destouches) dans son portrait à la cigarette. Les reflets de la structure métallique du Grand Palais se projettent sur le verre, en dessinant une espèce de cage verte… Miroir de l’angoisse de cet homme compliqué ? Céline me regarde en biais, avant de me susurrer : « mon véritable tourment c’est le sommeil ! Si j’avais toujours bien dormi, je n’aurais pas écrit une seule ligne. » (5)

Claudia Patuzzi

(1) « Albertine disparue », dans « À la recherche du temps perdu« , vol. 15, Marcel Proust, éd. Gallimard, 1946-1947, chap. 1 (« Le chagrin et l’oubli »), p. 70

(2) Résurrection, Léon Tolstoï (trad. Teodor de Wyzewa), éd. Perrin, 1900, chap. V, p. 69 (texte intégral sur Wikisource)

(3) Les châteaux de la subversion, Annie Le Brun, éd. Garnier Frères, coll. Folio Essais, 1982 (ISBN 2-07-032341-2), partie I, Un rêve de pierre, p. 80Sade :

(4) Mort à crédit, éd. Gallimard Folio, 1952, p. 17.

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